Faire face au harcèlement scolaire, quels indicateurs surveiller, les questions à poser et comment accompagner les enfants et les adolescents
Il y aurait environ 1 millions d'enfants enfants harcelés chaque année en France.
Définition du harcèlement scolaire
Le Larousse définit ainsi le harcèlement : « L’action de harceler consiste à soumettre quelqu’un à d’incessantes petites attaques. »
L’administration part de la définition générale en considérant que ce qui caractérise le harcèlement en milieu scolaire est à la fois l’âge des protagonistes et les territoires au sein desquels il se produit. Ces incessantes petites attaques auraient donc lieu dans la cour, dans les transports scolaires, sur les réseaux sociaux (mais avec des harceleurs faisant partie du même territoire scolaire, au sens large, que l’enfant harcelé), dans la classe, dans les couloirs, pendant les temps périscolaires, à proximité de l’établissement… La définition institutionnelle, transmise par les services du ministère de l’Éducation nationale, est la suivante : lorsqu’un enfant est insulté, menacé, battu, bousculé ou reçoit des messages injurieux à répétition, on parle de harcèlement.
Les trois caractéristiques du harcèlement en milieu scolaire sont :
– la violence : c’est un rapport de force et de domination entre un ou plusieurs élèves et une ou plusieurs victimes ;
– la répétitivité : il s’agit d’agressions qui se répètent régulièrement durant une longue période ;
– l’isolement de la victime : la victime est souvent isolée, plus petite, faible physiquement et dans l’incapacité de se défendre.
Le harcèlement se fonde sur le rejet de la différence et sur la stigmatisation de certaines caractéristiques, telles que :
– l’apparence physique (poids, taille, couleur ou type de cheveux) ;
– le sexe, l’identité de genre (garçon jugé trop efféminé, fille jugée trop masculine, sexisme), orientation sexuelle ou supposée ;
– un handicap (physique, psychique ou mental) ;
– un trouble de la communication qui affecte la parole (bégaiement, bredouillement) ; – l’appartenance à un groupe social ou culturel particulier ;
– des centres d’intérêts différents.
Il s’agit donc d’une définition qui se fonde prioritairement sur l’enfant harcelé et ses caractéristiques. Elle laisse entendre que le harcèlement ne pourrait viser que certains et pas d’autres : les enfants porteurs de « différences ».
Les praticiens qui consultent selon les principes de l’École de Palo Alto1 et qui travaillent plus sur l’apaisement des relations que sur la résolution de problèmes psychiques intrinsèques définissent le harcèlement en milieu scolaire comme une escalade complémentaire entre un enfant ou un groupe d’enfants, d’une part, et un autre enfant, d’autre part : le(s) premier(s) prenant de plus en plus de pouvoir dans la relation et le deuxième, conséquemment, en ayant de moins en moins, souffrant de cette escalade, et pouvant en garder des séquelles psychologiques à terme. Selon eux, cette escalade complémentaire ne s’appuie pas sur des différences ou des caractéristiques visibles des victimes, puisque nombre d’entre elles ne présentent aucune aspérité de la sorte, mais plutôt sur une vulnérabilité soupçonnée, puis validée, par le harceleur ou le groupe de harceleurs.
En effet, après une première, une deuxième, puis une dizaine d’attaques, l’enfant harcelé ne se défendant toujours pas ou pas de façon efficace, le(s) harceleur(s) s’en voi(en)t encouragé(s) et l’escalade complémentaire continue de prospérer.
Il s’agit donc d’un cercle vicieux qui prend souvent de plus en plus d’ampleur, et peut concerner n’importe quel enfant, qu’il soit différent ou pas, « stigmatisable » ou pas.
Cette acception ne considère pas non plus qu’il s’agisse de « petites » agressions, comme l’indique la définition générale, parce que dans la perception qu’en ont les enfants harcelés, il ne s’agit jamais de petites agressions, mais d’un ensemble puissant et profondément blessant, même lorsque, aux yeux des adultes, les attaques semblent anodines, voire ridicules. L’adjectif « petit » présente le risque d’atténuer cette souffrance et donc d’en dénaturer la définition dans son contexte.
C’est le psychologue Dan Olweus, souvent cité par les chercheurs britanniques, pionniers en la matière, qui en donne, selon les praticiens de l’École de Palo Alto, la définition la plus complète : « Quand on cherche querelle à un enfant, quand un autre enfant ou un groupe d’enfants lui disent des choses méchantes ou désagréables, quand il reçoit des coups de pied, est menacé, enfermé dans une pièce, reçoit des lettres ou des messages méchants, quand personne ne lui parle. Ces choses arrivent souvent et il est difficile pour lui de se défendre. »
Piquet, Emmanuelle Le Harcèlement scolaire en 100 questions
Les conséquences possibles du harcèlement
Que faut il surveiller et à quoi faut il être vigilant ? Tout en sachant que tous ces critères peuvent signifier que votre enfant vit quelque chose de complexe mais qui peut ne pas être du harcèlement scolaire. En cas de doute, prévenez l'établissement scolaire et faites vous accompagner par des professionnels qui évalueront la situation avec vous.
- Une démotivation pouvant entraîner un échec scolaire et un désintéressement pour les activités extra scolaires
- Une désocialisation avec perte de l'envie de sortir et de rencontrer d'autres personnes
- Une souffrance psychique pouvant aller de la tristesse aux traumatismes plus profonds comme l'angoisse, la dépression
- Une perte de l'estime et de la confiance en soi. La victime peut en arriver à ne plus supporter ni son corps, ni son image, elle perd confiance en ses capacités et se dévalorise
- Tendance à vouloir se rendre invisible aux yeux des autres en se dissimulant par exemple sous des vêtements amples
- Prises de drogues, médicaments ou alcool
- Tendance à la pratique de la mutilation (scarification) jusqu'au risque de passage à l'acte suicidaire
Extrait de Harcèlement scolaire Antony Verbrugge
Questions à poser aux enfants
La première question concerne la durée de la situation afin de détecter s’il s’agit d’une difficulté ponctuelle ou d’un problème enkysté, le harcèlement appartenant à la deuxième catégorie : « Depuis combien de temps est-ce difficile pour toi à l’école ? » Si la situation existe depuis plus d’un an, il est important de savoir si elle s’est modifiée lorsque l’enfant a changé de classe. Si elle perdure, c’est le signe d’un harcèlement qui persiste alors que le contexte change. Encore plus sûrement si l’enfant a changé d’établissement, car en ce cas les interactions avec ses pairs sont compliquées pour lui et sa vulnérabilité a été aggravée par des changements qui auraient pu avoir un effet d’apaisement. Ensuite, il est important d’interroger l’enfant sur ce qui a été mis en place par lui ou par son entourage et qui n’a pas fonctionné, voire qui a aggravé la situation de harcèlement. Si plusieurs tentatives se sont révélées inopérantes, c’est que l’on se trouve face à une situation complexe et problématique, que les solutions de bon sens ont échoué à faire cesser. Le fait de savoir ce qui a été effectivement mis en œuvre sans résultat permettra également d’écarter des chemins qui se sont avérés improductifs. Une question sur la façon dont se passent les relations en dehors du territoire scolaire donne également une idée de l’intensité de la souffrance et donc de la vulnérabilité de l’élève. Plus globalement, la question « Dirais-tu que pour toi, d’une façon générale, les relations avec les gens de ton âge sont difficiles ? » donne aussi une idée de la perception que l’enfant a de ses compétences sociales. Une réponse positive pousse là encore vers la conclusion que nous sommes bien face à une situation de harcèlement. Enfin, une question sur les conséquences de cette situation : conflits nouveaux dans la fratrie et plus globalement dans la famille, angoisses, crises de colère intempestives, chute des notes, insomnies sont des signaux supplémentaires d’une problématique enkystée. La somme de réponses positives à toutes ces questions montre clairement que l’enfant est victime de harcèlement scolaire.
Piquet, Emmanuelle Le Harcèlement scolaire en 100 questions
Numéro vert
- Le 3020 : un numéro d'appel gratuit subventionné par le ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse qui écoute et oriente les victimes de harcèlement à l'école.
- Le 3018 : le numéro vert national pour la prise en charge des victimes de cyberharcèlement (une appli est également disponible).
La prévention
Je dirais que face à ce phénomène complexe, il n y a pas une seule ligne de conduite à tenir.
Veillez à parler à votre enfant de ce qu'est le harcèlement scolaire. Donner l'information, afin que votre enfant puisse évaluer si ce qu'il vit est interdit. Créer un espace de dialogue avec lui, un espace de confiance, afin qu'il sache qu'il peut vous informer de tout, même s'il ressent de la peur ou de la honte, car vous ne le jugerez jamais.
Surveillez comment il va, au regard des facteurs cités plus hauts.
Ne pas hésitez à vous informer en cas de doute, à signaler.
Un enfant qui se sent bien dans sa peau et ses baskets, même s'il est différent des autres, un enfant qui a confiance en lui et sait s'affirmer est un enfant qui globalement sera moins pris pour cible, même si bien évidemment, on ne peut rien garantir ou prémunir. Veillez donc à l'accompagner sur ces points là.
Comment j'accompagne les enfants et les adolescents
Il va être délicat d'exposer clairement une méthode d'accompagnement, car celui-ci sera spécifique à votre enfant.
Les techniques proposées se feront après évaluation de la situation et en fonction de la gravité des éléments qui me seront rapportés.
L'accompagnement des symptômes sera une priorité en fonction de ce qui est vécu par l'enfant : angoisse, peur, dépression, troubles du sommeil, ne plus s'alimenter . . .
Un travail dans l'inconscient de l'enfant pourra être proposé autour de la notion d'avoir été victime de, de faire face à l'intimidation.
Si votre enfant présente des troubles de stress post traumatiques et un traumatisme qui découle des évènements, cela sera également accompagné.
Un travail autour de la confiance en soi, l'estime de soi et l'affirmation de soi sera nécessaire.
L'avantage de pouvoir utiliser des techniques comme l'hypnose, c'est qu'il n'est pas nécessaire que l'enfant verbalise ou s'exprime beaucoup sur son vécu, s'il ne le souhaite pas. Nous allons travailler avec cette modalité qu'est l'imaginaire (séances d'hypnose, de création de comtes métaphoriques, de dessins . . .). L'approche se veut donc être douce.
Certaines séances sont enregistrées afin de poursuivre le travail à la maison et il y a parfois des petits exercices à faire en suite de séance.